TEST de Fire Emblem: Three Houses, un sacré plan à trois de longue haleine
Fire Emblem: Three Houses : Après plus d'une centaine d'heures à jouer le professeur et stratège sur le champ de bataille, il est temps de distribuer les notes.
Fragmenter pour mieux régner
Les développeurs d'Intelligent Systems ont proposé ces dernières années plusieurs épisodes de Fire Emblem sur 3DS, démocratisant la licence auprès du grand public et la rendant surtout plus accessible. En faisant abstraction du spin-off Warriors, elle prend désormais d'assaut la Switch avec Fire Emblem: Three Houses, mettant fin à plus d'une décennie de jeux purement nomades pour revenir dans nos salons et renouveler avec succès la formule, bien aidée par Koei Tecmo. Si notre verdict est plus que positif, il n'empêche que ce nouvel élève de la console de Nintendo aurait pu mieux faire sur certains points.
Un contexte riche et immersif dans lequel il est facile de se plonger.
Nous y incarnons Byleth, dont le nom et le genre sont modifiables, mercenaire peu expressif parcourant les routes de Fódlan avec son père Jeralt et dont le destin change à jamais suite à la rencontre de trois jeunes étudiants de l'Académie des officiers de Garreg Mach, qu'il va protéger d'une attaque de bandits. Ces derniers ne sont autres que les futurs dirigeants des trois territoires du continent : Edelgard de l'Empire d'Adrestia, Dimitri du Royaume de Faerghus et Claude de l'Alliance de Leicester. Sans rien avoir demandé, Byleth va ainsi être chargé de faire la classe à l'une des trois maisons de l'établissement par l'Archevêque Rhea, à la tête de l'Église de Seiros, fort impressionnée par notre prouesse. Ces noms, et bien d'autres lancés à tour de bras durant notre périple, permettent de créer un contexte riche et immersif dans lequel il est facile de se plonger.
Dans l'ensemble, le scénario tend vers la dark fantasy et se révèle assez classique. Hormis le choix majeur entre les Aigles de jais, les Lions de saphir et les Cerfs d'or, la 1re partie est un tronc commun déployant lentement, mais sûrement, son intrigue, avec peu de variations selon la maison sélectionnée si ce n'est du côté des dialogues. L'envie d'en savoir plus est présente sur la durée la première fois que nous découvrons les évènements, alors que nous sentons que la paix en Fódlan pourrait bien vite voler en éclats. Au cours d'un deuxième passage, il est amusant de relever certains détails jusqu'alors implicites ou qui prennent un sens nouveau, mais c'est avant tout le choix d'une autre maison qui donne la motivation de revivre les mêmes évènements.
Des personnalités emblématiques
Afin de développer un tel univers, il fallait un casting d'envergure, et Fire Emblem: Three Houses ne manque pas de personnages hauts en couleur. Bon, il n'évite pas les éternels archétypes et clichés de l'animation japonaise, notamment du côté des élèves, presque tous issus de bonnes familles.
De nombreux passages nous ont littéralement fait éclater de rire.
Les saynètes de soutien, justement, comme l'ensemble des dialogues du jeu, sont entièrement doublées en anglais et japonais, un travail colossal vu leur nombre. La qualité est au rendez-vous dans la langue de Mishima avec laquelle nous avons joué tout du long et que nous recommandons fortement, tant la justesse est de mise. Le doublage dans celle de Shakespeare n'est pas en reste, que nous avons pu expérimenter grâce à la section Extra permettant de revivre chaque scène du scénario et cinématiques en y appliquant les paramètres de notre choix, mais il manque de profondeur pour certains personnages. Le cas le plus flagrant est celui de Petra, ne maîtrisant pas bien le fódlien, chose qu'arrive mieux à retranscrire son hésitation en japonais. La traduction française est elle aussi de qualité, mais se base sur les dialogues anglais, ce qui entraîne parfois certains rajouts ou décalages entre ce qui est entendu et lu.
Garreg Mach, un hub omniprésent
La progression narrative de Fire Emblem: Three Houses se fait principalement par l'intermédiaire du monastère dans lequel se situe l'académie, qui va devenir votre nouveau foyer virtuel pendant de très longues heures de jeu. Ce lieu ecclésiastique apporte une profondeur nouvelle à la licence en concentrant tout l'aspect gestion au sein d'un hub régi par un calendrier, qui autorise peu le repos dominical. Au début de chaque mois, une tâche nous est ainsi confiée, prenant la forme d'une bataille avec nos élèves et se déroulant en général à sa toute fin. Cela a pour conséquence d'installer une petite routine s'étalant sur près d'une année lors de la 1re partie du jeu, qui devient tout de même légèrement lassante au bout d'un moment.
Le monastère apporte une profondeur nouvelle à la licence.
La semaine file ensuite jusqu'au samedi, à moins qu'un évènement ne sollicite notre attention (dialogues de Soutien, anniversaires, célébrations du monastère...), pour arriver directement à l'attribution des points de compétences et donc voir le fruit de nos efforts. S'en suit le jour le plus important, le dimanche, où nous avons le choix entre quatre types d'activités. Pour commencer, Se reposer restaure notamment une partie de la jauge de motivation des troupes, mais c'est clairement l'option que nous n'avons utilisée qu'une unique fois tant les autres sont bien plus utiles.
Troisième option qui s'avère plutôt utile, surtout en début de partie, le Séminaire nous propose tout simplement de prendre des cours supplémentaires auprès d'un autre professeur ou haut gradé de l'Église de Seiros, Byleth inclus. S'il n'est pas derrière le pupitre de l'enseignant, c'est sur le banc avec jusqu'à cinq autres élèves que nous le trouvons, ces derniers étant choisi en fonction des Objectifs fixés et des matières enseignées par chaque intervenant. Autre avantage, la motivation de tout ce petit monde remonte à 100 %, ce qui n'arriverait sûrement pas dans le monde réel...
Enseignant à plein temps !
Enfin, le meilleur pour la fin, le Quartier libre permet d'arpenter le monastère afin d'y glaner quelques quêtes, discuter avec les étudiants et le personnel pour enrichir notre compréhension de chacun et de l'histoire de Fódlan, et effectuer diverses activités. Cette école, ses maisons et ses chouettes volant jusqu'aux tableaux d'activité offrent réellement une ambiance proche de Poudlard, une inspiration qui n'est franchement pas déplaisante.
Garreg Mach ne manque pas de possibilités pour occuper notre temps.
Comme déjà évoqué, des quêtes peuvent nous être données par tout ce petit monde, certaines pouvant être résolues par un affrontement, mais dans la majorité des cas, il s'agit plutôt de rapporter un item ou aller papoter, rien de bien compliquer quand tout est indiqué sur la carte. Des objets trouvés scintillants au sol permettent eux d'améliorer nos relations en les rapportant à celui ou celle l'ayant perdu, en plus de booster la motivation de l'intéressé. Une description nous met sur la voie, et au pire, il suffit d'essayer avec tout le monde. Rien de dingue, mais ça a le mérite d'apporter de la variété à l'expérience.
Ce lieu convivial propose ainsi de cuisiner un bon petit plat, à l'aide des denrées possédées dans notre entrepôt, en compagnie d'un élève dans le but d'attribuer des bonus temporaires à nos alliés, tout en augmentant l'affinité entre Byleth et le personnage choisi. L'autre possibilité consiste à sélectionner deux convives afin de passer un bon moment en se remplissant la panse, soit avec le plat du jour ou bien parmi une liste utilisant alors nos ingrédients. Cette fois, cela augmente à fond leur motivation et renforce leur affinité, à condition qu'ils aiment le contenu de leur assiette, cela va de soi. Dans ces deux cas, notre niveau d'enseignant augmente, histoire de faire d'une pierre deux coups.
Oui, Garreg Mach ne manque pas de possibilités pour occuper notre temps, et jongler entre les différentes activités peut par moment se révéler un vrai casse-tête logistique. C'est d'autant plus vrai qu'un autre élément vient se greffer à l'équation, la progression de notre personnage, Byleth. Lui aussi dispose des mêmes talents à augmenter, en plus d'un niveau d'enseignant allant jusqu'à A+ (une seule partie ne suffit pas pour l'atteindre) lui permettant d'effectuer davantage de tâches via un nombre de points donnés (de bataille, de tutorat et d'activité) et disposer d'un budget mensuel plus confortable attribué par l'Église de Seiros. Les membres importants du monastère, dont les professeurs, nous servent ainsi de tuteurs pour nous perfectionner dans les différents domaines, un point dépensé équivalant à un entraînement. Il faut donc aussi choisir entre notre personne et nos élèves, sachant que les deux sont intrinsèquement liés.
Une tactique gagnante
Venons-en désormais à la raison principale pour laquelle est attendu un Fire Emblem, son gameplay tactique nous plongeant dans des batailles sur fond de cartes quadrillées avec nos unités vues de dessus, indications de la portée des attaques et des limites des déplacements adverses, etc. En plus du choix de la difficulté (Normal et Difficile), à la différence peu flagrante, il est possible comme depuis quelques épisodes déjà de sélectionner le mode Débutant ou Classique, ce dernier faisant mourir définitivement nos unités tombées au combat, sauf exception due au scénario.
La flexibilité est énorme en termes de choix d'évolution.
Chacune confère des bonus de statistiques différents, requiert un certain niveau d'Autorité pour être équipée et gagne aussi de l'expérience au combat. Étant sujettes aux coups ennemis, il faut tout de même en prendre soin moyennant quelques pièces pour régénérer régulièrement son endurance à la Guilde. En contrepartie, nous sommes capables de déclencher une Tactique sur le front, comme envoyer une volée de flèches avec notre Chevalier ou transformer une vaste zone en Fournaise brûlant tous ceux s'y trouvant. Le camp adverse peut en faire de même, mais l'IA est loin de les gérer de façon optimale.
Le champ (de bataille) de tous les possibles
Elle l'est d'autant plus avec la disparition pure et simple du triangle des armes, qui se fait vite ressentir dans la manière d'appréhender les troupes adverses, bien qu'elles aient tout de même des points forts et faibles. En soi, ça ne nous a absolument pas gênés, mais les puristes regretteront sans doute ce retrait.
Un réel sentiment de progression constante.
Les classes magiques peuvent quant à elle lancer des sorts en plus de manier les armes, tous ayant un nombre d'utilisations limité se régénérant entre chaque affrontement. Leur quantité est plus faible que par le passé, qu'ils soient offensifs ou défensifs, et la montée dans les rangs n'en débloque que rarement et pas forcément les mêmes selon l'individu. Ils n'en restent pas moins fort utiles, mais semblent avoir été relayés au second plan. Dans tous les cas, en plus du gain d'XP suite à chaque joute, l'utilisation de l'arsenal renforce les divers talents, donnant au final un réel sentiment de progression constante à travers l'ensemble de nos actions.
La difficulté n'est elle pas trop élevée dans l'ensemble, surtout que nous disposons d'un sacré filet de sécurité voulu par le scénario, même s'il n'y recourt que très peu, l'Impulsion divine. Sous cet étrange terme se cache simplement la possibilité de remonter le temps lors de notre tour afin de modifier nos actions. Bien qu'elle soit limitée par un nombre d'utilisations, assez élevé d'ailleurs, son champ d'action est si vaste qu'il est aisé de retourner cinq tours en arrière et changer totalement l'issu de l'affrontement. Ajoutez à cela les bonus liés au positionnement de nos troupes selon leur niveau de Soutien, ainsi que l'activation aléatoire des Emblèmes pour ceux en possédant, renforçant les statistiques le temps d'un coup, et vous comprendrez qu'il est aisé de s'en sortir en ne fonçant pas tête baissée. Pour finir, la touche + nous donne accès à une vue rapprochée du champ de bataille avec nos unités et leurs escouades les entourant, un ajout anecdotique très peu utilisé et purement visuel.
Déroute technique ?
Si la tactique reste toujours aussi brillante, la technique fait hélas pale figure à bien des égards, sans doute peu aidée par la puissance de la console. En effet, l'aliasing est présent à l'appel, que ce soit en mode TV ou Portable, se faisant oublier sur la durée tant notre attention est portée ailleurs, mais tout de même. L'autre écueil à relever concerne le framerate au sein du monastère. Alors que nous courrons par monts et par vaux, de petites chutes se font sentir, de quoi nous agacer au bout d'un moment.
La bande-son ravit nos oreilles avec des thèmes épiques et variés.
À côté de ça, les cinématiques sont superbement réalisées et le chara design est des plus appréciables à l'œil, surtout après l'ellipse avec des costumes bien plus colorés. Notons également le souci du détail pour les saynètes, dont certaines utilisent les modèles des personnages étudiants et adultes. Ces derniers doivent en revanche se partager certaines animations de dialogues, mais cela se remarque surtout en jouant avec les différentes maisons. Celles des classes proposent du dynamisme en pleine action avec des coups vifs et quelques bonnes esquives, ce qui est bien moins le cas des Escouades, donnant par moment l'impression de taper dans le vide... Enfin, la bande-son ravit nos oreilles avec des thèmes épiques et variés mélangeant habilement musique orchestrale et électronique pour souligner l'intensité des combats, avec des interludes martiaux, des morceaux à l'ambiance mystérieuse ou encore de calmes et reposantes mélopées au monastère.
La croix et la bannière
Fire Emblem: Three Houses est sans conteste l'épisode le plus long de la saga avec une durée de vie colossale. S'il est possible de « rusher » l'aventure en passant pour le coup à côté de toute sa richesse, comptez facilement 80 heures rien que pour venir à bout d'une route.
Un excellent Tactical RPG aux multiples possibilités.
Malheureusement, cette possibilité ne compense pas entièrement le fait qu'aucun contenu post-game n'est présent pour nous permettre d'utiliser nos unités longuement entraînées, même si cela se justifie d'un point de vue narratif. Un mode annexe pour simplement effectuer des batailles sans être obligé de recommencer l'aventure n'aurait donc pas été de trop. Par ailleurs, l'obligation de jouer le tronc commun de l'intrigue plusieurs fois simplement pour découvrir les différents embranchements a de quoi lasser, même en changeant de maison.
Vous l'aurez compris si vous avez tenu jusqu'au bout, nous avons aimé Fire Emblem: Three Houses pour ce qu'il est, à savoir un excellent Tactical RPG aux multiples possibilités, qui fait plus que jamais la part belle à la gestion des troupes. En mettant de côté sa réalisation technique qui n'est pas au niveau des standards actuels, il apporte tout de même un vent de renouveau sur la licence avec son hub incontournable et plaira aux amateurs de jeux bavards souhaitant en apprendre davantage sur son univers et ses occupants, bien qu'un contenu moins fragmenté aurait été plus plaisant. Forcément, son accessibilité, sa difficulté abordable et certains choix de gameplay ne seront pas du goût de tous les vétérans, mais pour les autres, les heures défileront pour arriver jusqu'au générique de fin et au-delà.
- Un scénario épique avec de bons rebondissements
- Un univers riche au casting attachant
- Une durée de vie colossale
- Une grande liberté d'action et de choix
- La gestion poussée des unités via le monastère
- Un gameplay tactique facile d'accès et efficace
- La Nouvelle partie + pour arpenter les différentes routes plus aisément
- ... mais un peu trop fragmenté
- Une technique à revoir (aliasing, chutes de framerate et textures)
- Certains ajouts anecdotiques
- Pas de contenu post-game