EDITO : Ubisoft accusé d’homophobie, que penser de la polémique ?
En s’excusant auprès des joueurs choqués par sa prise de position narrative du 2e DLC, et en annonçant la sortie d’un patch pour « corriger le tir » le développeur semble plaider la culpabilité d’une homophobie contre laquelle il lutte pourtant activement.
Quand nous interrogeons les joueurs, ce qui séduit dans l’univers Assassin’s Creed au-delà du gameplay, c’est bien le réalisme historique du jeu et Assassin’s Creed Odyssey n’échappe pas, loin de là, à cette règle. C’est beau, c’est propre, c’est réaliste, c’est immersif et c’est signé Ubisoft. Depuis la sortie du dernier opus, qui bat tous les records de vente de la franchise, tout allait pour le mieux au Pays de Kassandra et ce, même si une étude récente montrait que c’était bien Alexios qui, dans la liberté de jeu offerte, donnait au genre masculin un caractère indétrônable chez les utilisateurs. Si nous étions de mauvaise foi, nous pourrions nous interroger sur le dessin misogyne du choix laissé au joueur d’affirmer le côté phallique de l’univers.
Tout cela nous rappelle que dans les minorités invisibles, il existe parfois de plus petites minorités visibles qui tendent, à force de vouloir se défendre, à exclure encore plus.
En revanche, si Odyssey, en termes de liberté, ne souffrait jusque-là d’aucune fausse note, le second DLC a déçu ses joueurs en ne les laissant pas complètement libres de l’évolution de leur personnage et en les condamnant à une hétérosexualité après leur avoir ouvert le champ de tous les possibles en termes de relations amoureuses. Cette dernière, à l’heure où historiquement parlant les procréations médicalement assistées et autres gestations par autrui n’existaient pas, semblait pourtant la seule issue possible pour assurer la lignée des Assassins. Le titre du DLC nous parle d’un héritage de l’ombre, et les conséquences de ce nécessaire et cohérent choix narratif nous renvoient surtout à l’ombre que vient poser cet héritage. Parce que oui, cela n’est pas sans poser des questions et, parmi elles, le risque pris par un développeur de vouloir faire bouger les lignes d’une société à travers l’incontournable média qu’est devenu le jeu vidéo. Nous en serions donc là ? À vouloir lancer, comme trop peu avant lui, le débat autour de la question de la sexualité de ses héros, la société Ubisoft a ouvert - univers mythologique oblige - une boîte de Pandore qu’elle a refermée trop vite aux yeux des utilisateurs jusque-là ravis.
Tout cela nous rappelle que dans les minorités invisibles, il existe parfois de plus petites minorités visibles qui tendent, à force de vouloir se défendre, à exclure encore plus. En réagissant de la sorte, Ubisoft participe à cette drôle de mise en scène. Nous pouvons dès lors nous interroger sur le bon sens de la réaction du développeur. D'autant plus qu'il crée là un très médiatique précédent. Et pour en revenir à la polémique qui a été soulevée ici, nous dirions que si les dieux grecs, ou d’ailleurs, auraient pu donner à l’époque d’Odyssey un moyen de faire perpétuer la lignée en dehors d’une fécondation au sein du couple hétérosexuel, nous n’en serions pas là de ces interrogations. Mais suis-je bête ? Cela a été le cas, mais voilà bien une autre très longue histoire...