TEST Fire Emblem Engage : des noces de cuivre qui ravivent la flamme d'antan
Fire Emblem Engage : Après une courte sieste, la licence Fire Emblem fait déjà son retour dans nos consoles. Le charme prend-il toujours ?
Un Marth et ça repart !
À l'été 2019, Nintendo et Intelligent Systems nous régalaient avec Fire Emblem: Three Houses, un épisode inédit sur Switch de la licence de Tactical RPG aussi accessible qu'ultra complet, bien que techniquement perfectible, qui proposait plusieurs scénarios alternatifs prenants pour de très longues heures de jeu. Après l'avoir décliné en Warriors l'an dernier, l'éditeur est désormais de retour avec une expérience stratégique entièrement inédite répondant au doux nom de Fire Emblem Engage. Sa particularité principale à bien des égards est son côté « anniversaire » dans le sens où il fait intervenir les 12 héros des précédents jeux parus depuis 1990. Après nos premières impressions plutôt positives faisant suite à la découverte des premiers chapitres de l'aventure, nous avons poursuivi notre idylle en Elyos bien des heures durant. De quoi nous donner envie d'épouser sa cause ?
Des cartes actualisées tirées des précédents jeux de la saga.
Si ce pitch de départ vous semble ô combien manichéen, c'est bien parce qu'il l'est malgré les tentatives pour nuancer les actions des antagonistes et générer de l'empathie à leur égard. Et vous savez quoi ? Cela a parfaitement fonctionné sur nous. Avec ses thématiques autour des liens et de la famille, Fire Emblem Engage arbore un ton finalement assez léger même quand il cherche à se prendre (un peu trop) au sérieux, cochant nombre de cases du genre shōnen nekketsu avec ce que cela implique comme clichés. Si l'intrigue comporte quelques retournements de situation que nous n'avions pas vus venir, une grande partie de ces plot twists se devine aisément bien en amont des révélations, car ils sautent aux yeux. Fort heureusement, la mise en scène des cinématiques et le côté épique qui peut s'en dégager parviennent à quelque peu gommer ces « défauts » d'écriture. Pour autant, certaines facilités scénaristiques employées nous ont fait lever les yeux au ciel à plusieurs reprises. Et derrière son PEGI 12, le jeu ne montre pas une goutte de sang ni blessure apparente lors de scènes pourtant importantes, avec à plusieurs reprises de belles gifles off-screen… Enfin, même avec toutes les révélations en tête, l'introduction du jeu n'a pour nous aucun sens, surtout avec comme intitulé « Bataille du passé » dans le menu permettant de la revoir.
Eh bien, pour commencer, les Annexes, aussi connues sous le terme de Paralogue en anglais, que nous débloquons au fur et à mesure. Si les deux premières batailles de ce type permettent de recruter tout autant de personnages et font donc office de sympathiques quêtes annexes, et que la dernière est liée à l'équivalent du « rang S », les douze autres raviront sans nul doute les fans de longue date. En effet, elles nous font jouer sur des cartes actualisées tirées de précédents jeux de la saga, chacune en lien avec un moment clé de ces aventures, et servent d'épreuves nous opposant à nos compagnons Emblèmes. En revanche, allez savoir pourquoi ces zones existent à Elyos, aucune explication n'étant donnée alors que cela soulève pourtant l'interrogation auprès de nos héros. Là encore, c'est du one shot, nous n'aurions pas été contre une option pour nous y essayer à nouveau. Ce qui ne l'est pas en revanche, ce sont les Escarmouches et Entraînements, qui sont des batailles nous opposants respectivement à des Aberrations (les morts-vivants utilisés par Sombron et ses acolytes) et à des soldats des royaumes alliés. Elles se renouvèlent régulièrement et disposent d'un niveau recommandé augmentant avec notre propre progression, constituant un bon moyen de s'améliorer et engranger des ressources. Par ailleurs, aucun mode New Game+ n'est inclus, c'est donc l'un des seuls moyens de continuer à combattre avec nos personnages.
Mes précieux !
À la table des convives, nous retrouvons du beau monde avec un total de 36 protagonistes jouables, bien plus que dans Three Houses (sans les DLC) où tous n'étaient pas accessibles selon la route choisie. L'approche vis-à-vis de ce casting est assez différente, avec des personnalités aussi colorées que leurs tenues ou couleurs de cheveux, dont les vagues bribes de passé obtenues en dialogue sont bien plus chaleureuses que ceux de nos chers élèves. Nous n'évitons en revanche pas les clichés sur pattes et leur appréciation dépendra des sensibilités de chacun. Dans le lot, nous avons quelques favoris, mais impossible d'en parler sans spoiler, hélas. Tous peuvent utiliser les fameux Anneaux d'Emblèmes qui sont au cœur du jeu et sur lesquels nous allons un peu nous attarder.
L'utilisation des Emblèmes fait tout le charme du jeu.
Au passage, la métaphore évidente du mariage se poursuit jusque dans l'apparence de ces formes fusionnées, avec des costumes trois-pièces où le blanc et les couleurs pastel prédominent. Le principe même nous rappelle d'ailleurs les Performa de Tokyo Mirage Sessions ♯FE. Une fois la durée de fusion passée, il faut alors combattre pour que la jauge se remplisse petit à petit si nous souhaitons à nouveau l'utiliser, l'Emblème restant toutefois à nos côtés. Autre solution, faire attendre l'unité sur une case où se trouve de l'énergie pour entièrement la recharger. Et ne croyez pas que nous sommes les seuls à nous servir des anneaux. Dans les mains ennemies, l'Engagement noir leur permet également d'utiliser les Attaques de fusion sans pour autant ne faire qu'un avec leur Emblème.
Les Emblèmes octroient également plusieurs armes de fusion que les fans reconnaîtront, dont des Reliques de héros pour Byleth, qui peuvent être légèrement améliorées à l'aide de cristaux et manuels, dont nous reviendrons sur l'obtention par la suite. Les fans d'optimisation devront aussi prendre en compte l'héritage, servant à débloquer les techniques des Emblèmes en échange de PT acquis au combat et disposant de leurs propres emplacements, mais seulement lorsque le niveau de Lien nécessaire est atteint. À ce sujet, de très courts dialogues (C, B et A) sont présents, mais un peu trop génériques à notre goût.
Engagez-vous qu'ils disaient
Que vous soyez un novice ou un joueur aguerri, l'expérience tactique au tour par tour offerte par Fire Emblem Engage a de quoi satisfaire tout le monde. Pour commencer, trois niveaux de difficulté peuvent être sélectionnés en lançant une partie (Normal, Difficile et Expert), auxquels s'ajoute l'option désormais normalisée de la mort permanente ou non de nos unités (modes Débutant ou Classique) et une autre concernant la répartition plus ou moins aléatoire des statistiques à chaque montée de niveau. Dans tous les cas, un cristal temporel est acquis assez tôt et permet de remonter le temps à notre guise pour modifier le cours de la bataille, avec une utilisation illimitée ou via plusieurs charges selon le mode choisi. Même en n'ayant pas opté pour la permadeath, nous avons pris soin de ne pas faire mourir nos compagnons et ce ne fut pas une partie de plaisir tant l'IA sait se montrer redoutable.
Engage revient aux fondamentaux en embrassant à nouveau le triangle des armes.
Si Three Houses était assez tendre en termes de stratégie, Engage revient aux fondamentaux en embrassant à nouveau le triangle des armes (épée > hache > lance > épée), ainsi que l'avantage des Arts (techniques de poings) sur les arcs, tomes de magie et dagues (dégâts de poison). L'objectif est donc de tirer parti de ce système afin de briser la garde de l'ennemi pour la durée du tour (parfois enchaînée à celle d'un autre). Dans cet état, il n'est alors plus capable de riposter à nos offensives, nous évitant des blessures inutiles, voire mortelles. Évidemment, cette règle s'applique aussi contre nous, il faut donc bien veiller à nos placements et surveiller la portée des coups, en plus du taux de précision jouant sur l'esquive. Deux unités proches peuvent également donner lieu à des attaques enchaînées, faisant parfois la différence à quelques PV près. Pour corser encore un peu plus les joutes, les boss et autres ennemis puissants possèdent sur eux une ou plusieurs pierres de résurrection, restaurant toute leur vie une fois celle-ci tombée à 0, il faut donc bien tout planifier avant de s'y frotter, car le retour de feu peut faire mal !
Au-delà de ça, la variété est bien présente, car chaque personnage peut accéder à une cinquantaine de classes différentes (certaines ne sont qu'une variation en fonction de leur arme principale), les principaux en ayant deux qui leur sont propres. Oui, c'est énorme et les troupes adverses bénéficient bien sûr de cette diversité, même si visuellement cela reste en général des Aberrations. Relevons également la présence de vouivres du côté des créatures géantes, tandis que les principaux généraux de Sombron auxquels nous sommes confrontés sont peu nombreux, baptisés les Quatre Chacals, leur permettant d'avoir une présence à l'écran ayant plus d'impact, surtout la sulfureuse Zephia !
Lune de miel en plein ciel
À la suite de chaque bataille (sauf cas particulier du scénario), nous avons droit à une phase dite d'Exploration au sein d'une zone limitée de la map que nous venons de terminer. Tout y modélisé en 3D de manière détaillée, de quoi prendre conscience de la taille de certains décors même si la distance d'affichage des personnages est limitée. Quel est le but ici ? Simplement discuter avec chaque membre du groupe, qu'ils aient ou non participés (certains nous le font gentiment remarquer), avec des commentaires concernant le déroulement de l'intrigue et les exploits martiaux réalisés. Quelques objets sont à ramasser au sol quand d'autres sont offerts (des Fragments de lien principalement) et des animaux locaux peuvent être adoptés. Oui, vous avez bien lu, ce qui nous mène logiquement à Somniel et son contenu.
Tous les personnages n'ont pas accès à des dialogues de Soutien.
Plus utiles et distrayants, nous trouvons quelques mini-jeux. Notre préféré est sans nul doute la pêche, où nous devons lancer la ligne, attendre que ça morde puis appuyer sur A, démarrant une phase qui alterne entre ramener à nous la prise en orientant le joystick gauche dans la bonne direction et marteler A pour faire baisse sa barre de vie. Une vingtaine d'espèces est incluse, avec entre autres des Fragments de lien à la clé, et différentes tailles allant jusqu'à Gigantesque pour les plus complétionistes. Il faut néanmoins posséder les trois types de cannes pour toutes les rencontrer et un peu de chance. Les sticks ont aussi la vie dure lors des flexions, l'un des trois entraînements physiques prenant la forme d'un jeu de rythme basé sur le timing. Les deux autres consistent à effectuer des pompes en appuyant sur A au bon moment et des abdominaux en martelant cette même touche. Si c'est assez amusant les premières fois et constitue un bon défi en Difficile, devoir se démener autant pour une simple augmentation temporaire d'une des statistiques d'Alear lors du combat suivant ne vaut pas le temps investi, surtout que trois erreurs signent la fin de l'essai. Le dernier est le vol sur wyverne, qui prend la forme d'une séance de shoot'em up où il faut tirer sur des cristaux au fil de trois parcours prédéfinis, plutôt agréable bien que quelque peu imprécis.
Vient ensuite l'arène, notre salle de l'esprit et du temps personnelle où nos personnages peuvent se livrer des duels en 1v1. La particularité est que l'adverse est aléatoire… et donc le résultat. Ce n'est donc clairement pas un bon moyen de remettre à niveau les unités à la traîne, qui reste donc inutilisées à moins de passer des heures en Escarmouches, surtout que seules trois utilisations sont permises entre chaque bataille. En revanche, combattre les Emblèmes en échange de Fragments de lien permet rapidement d'augmenter leur Lien. Au moins, ce lieu est l'occasion de monter les soutiens en supplément de leur entraide sur le terrain, du moins si la paire a des affinités.
Un Multivers sans folie
Enfin, le dernier lieu de Somniel est la Tour des épreuves qui regroupe trois activités annexes prenant elles bien place sur le champ de bataille. La première est sans doute la plus « intéressante » puisqu'elle est accessible à tous. Appelée Tourmente, elle consiste en une succession de trois batailles, d'abord sur deux cartes basiques inspirées des divers environnements déjà traversés à Elyos, puis sur une inédite à l'esthétique « céleste » commune à tous les biomes, permettant d'obtenir en récompense des cristaux et tomes selon la difficulté fixée (jusqu'à 50). Bon… vu le peu d'unités à disposition et la dérouillée que nous nous sommes prise en sélectionnant ce qui nous était recommandé (38), il faut s'accrocher pour en voir le bout à haut niveau. Pas sûr que l'envie y soit. Nous avons tout de même réussi grâce aux formidables esquives de notre Alear, mais ce fut loin d'être élégant. Au début de chaque nouvelle map, il est possible et évidemment conseillé de remplacer les combattants tombés au champ d'honneur par d'autres tout frais, voire ceux encore debout et qui manquent de PV. Une sacrée épreuve d'endurance. À l'inverse, un autre essai avec la difficulté fixée à 10 nous a vu rouler sur nos ennemis sans subir de dégât. Forcément, nos gains étaient moindres. Autant dire que chacun devrait y trouver un défi à sa hauteur.
Ce « multijoueur » est donc plutôt anecdotique en l'état.
Enfin, dans les Épreuves du Multivers, nous affrontons l'armée d'un autre joueur sur une carte assez réduite. Le plus simple est de sélectionner Partie rapide si le seul but est d'en découdre. Sinon, la Partie personnalisée offre la possibilité de créer notre map à partir d'une sélection d'assets (rien de très poussé, c'est loin de ce que propose la campagne) et d'y assigner des équipes de défense en indiquant de quelle manière chaque unité devra se comporter. En revanche, elles ne peuvent pas servir dans notre groupe attaquant. Et en connectant notre création à celle d'un autre joueur, une bataille a lieu. Forcément, un novice se fera rouler dessus par une personne ayant déjà terminé le jeu puisque les statistiques de nos généraux sont conservées. La question des DLC se pose également, puisque des Emblèmes inédits seront accessibles de cette manière. Un risque de grand déséquilibre à venir ? En tout cas, ce « multijoueur » est donc plutôt anecdotique en l'état. À noter que les retours en arrière ne sont pas permis lors de ces parties en ligne, alors pas le droit à l'erreur ! Et histoire de laisser un souvenir à nos camarades ou adversaires, une carte de profil est à éditer aux Archives, personnalisables de bien des manières, notamment via des tampons des protagonistes en pixels ou une photo prise dans Somniel avec nos compagnons favoris.
Lui passer la bague au doigt ?
Avant de conclure, il reste encore quelques points évidents à aborder, à commencer par les graphismes. Si nous avons principalement joué en mode Portable, qui se prête mieux à ce type d'expérience, nous n'avons pas décelé de différence en passant en mode TV, la direction artistique typée japanimation rendant bien dans les deux cas. En plus des décors et personnages en 3D, quelques sublimes plans en 2D viennent par moment illustrer notre arrivée dans de nouvelles destinations ou des moments forts de l'intrigue. À n'en pas douter, le dernier du genre à la toute fin devrait plaire aux fans et fera un parfait fond d'écran ! La fluidité des batailles est elle irréprochable en toute circonstance et chaque coup critique dispose de sa propre animation, ce qui est fort appréciable. Pouvoir attaquer à distance par-dessus les murs dans un bâtiment l'est en revanche un peu moins.
Une entrée assez solide de la licence.
La bande-son se veut assez classique pour un Fire Emblem, avec certains thèmes forcément bien épiques et sombres lorsque la situation le nécessite, un vrai régal. Mentions spéciales à celui du chapitre 25 dans sa version « frénésie », vraiment incroyable, et à l'Épreuve des Emblèmes mêlant les sonorités d'antan à celles actuelles ! Plus étonnant, de la dubstep est utilisée, par exemple pour les Quatre Chacals et cela rend super bien. Enfin, le doublage japonais est évidemment de qualité, même si la nature clichée de certains personnages fait que des dialogues sont un peu too much par moment. Et comme déjà évoqué lors de notre preview, la traduction s'éloigne clairement de ce qui est dit dans la langue de Mishima par moment, collant sans doute davantage à l'anglais, avec quelques expressions bien de chez nous pas piquée des hannetons et fort amusantes. D'autres nous ont sinon semblé archaïques, pouvant correspondre à un phrasé soutenu, avec tout de même deux trois fautes par-ci par-là.
Puisque tout Fire Emblem se conclut par un récapitulatif de nos batailles et que ce nouvel épisode ne fait pas exception, sachez que nous avons passé 80 heures dessus avant de vous livrer ces impressions. Cela comprend la complétion de son engageante histoire pour plus de la moitié, une partie de ses Annexes fan service, de trop longs passages à Somniel et de quoi nous faire un avis sur la Tour des épreuves, qui ne restera pas dans les annales. Fire Emblem Engage se révèle donc être une entrée assez solide de la licence qui réunit ce qu'elle sait faire de mieux sur le plan tactique. Nous en ressortons globalement satisfait et charmé. De là à lui passer la bague au doigt ? Pour l'éternité, peut-être pas, mais pour encore quelques heures de plus, pourquoi pas !
Fire Emblem Engage est disponible au prix de 44,99 € sur Amazon.
- Un scénario plaisant sur la longueur, épique par moment…
- Un casting de personnages attachants, bien que clichés
- Des affrontements palpitants, mettant notre sens tactique à l'épreuve
- Une grande variété de cartes
- La mécanique des Emblèmes, implémentée avec brio
- Somniel, un hub bien conçu et charmant
- Une très bonne durée de vie
- Des graphismes chatoyants
- … mais très manichéen, prévisible et avec de grosses ficelles scénaristiques
- Des fonctionnalités un peu trop anecdotiques, voire dispensables (le gacha…)
- Le système de classe assez brouillon
- La distance d'affichage trop faible en Exploration
- Un « endgame » et du « multijoueur » inintéressants