TEST Alan Wake 2 : une histoire de monstres
L’écrivain est de retour pour affronter l’Ombre Noire, mais cette fois, il est aidé par le FBI. Enfin un bon survival-horror moderne à se mettre sous la dent ?
Alan, wake up !
Déjà acclamé pour les Max Payne, deux jeux de tir qui ont popularisé le bullet time, Remedy Entertainment lançait en 2010 Alan Wake, un survival-horror suivant un auteur s’isolant à Bright Falls pour écrire un nouveau roman, mais qui se retrouvait piégé dans une fiction qu’il ne se souvenait pas avoir écrit, devant sauver sa femme Alice des griffes de l’Ombre Noire. Un titre très apprécié qui sentait bon le Stephen King et le Twin Peaks, et qui a droit à une suite 13 ans plus tard.
Une aventure vertigineuse et haletante, pleine de rebondissements.
Alan Wake 2 se déroule donc 13 ans après les évènements survenus dans le premier volet. Saga Anderson, agent du FBI, débarque dans la petite fille de Bright Falls pour enquêter sur un meurtre sordide, qui serait l’œuvre d’un tueur en série. Accompagnée d’Alex Casey (incarné par le directeur artistique de Remedy Sam Lake en personne, et qui prêtait déjà ses traits à Max Payne à l’époque), elle découvre vite que c’est la Secte de l’Arbre qui se cache derrière ces crimes rituels, et que tout cela pourrait être lié à Alan Wake, célèbre auteur de romans fantastiques disparu 13 ans plus tôt dans le Cauldron Lake. Jusqu’ici, tout va bien, mais nous n’en dirons pas davantage sur le scénario d’Alan Wake 2, tant il fait la force de cette suite. Il faut bien s’accrocher, et surtout prendre le temps de lire les notes disséminées dans l’environnement, pour comprendre toute l’histoire de cette suite, évidemment très liée à Alan Wake premier du nom mais également à Control, quoi qu’en dise Remedy. Si vous ne connaissez rien du Bureau Fédéral de Contrôle, la seconde moitié du jeu risque d’être très obscure à suivre.
Le studio finlandais est connu pour sa narration alambiquée, mais dans Alan Wake 2, il atteint des sommets, les joueurs qui aiment réfléchir, se perdre et démêler le vrai du faux sont aux anges. Le titre permet d’incarner Saga Anderson et Alan Wake dans deux scénarios qui sont évidemment liés, et le joueur passe son temps à se demander ce qu’il se passe, si un personnage est bien dans la réalité, où s’arrête la fiction, qui devient fou ou qui ne l’est pas. Une narration tordue, réarrangée puis retordue dans tous les sens, les neurones chauffent, mais c’est un vrai régal de suivre les pérégrinations de Saga et Alan à Bright Falls et New York. Tout cela est permis grâce à l’utilisation de nombreuses vidéos en live-action, brouillant un peu plus la frontière entre le virtuel et le réel. En général, ce sont des cinématiques ou des vidéos sur VHS à trouver dans les décors, mais une séquence brouille savamment les pistes dans une mise en scène grandiloquente, nous ne vous en dirons pas plus, elle vaut le coup d’être découverte et vécue manette en main. Tout cela mis bout à bout, c’est une aventure vertigineuse et haletante, pleine de rebondissements, d’une vingtaine d’heures que nous propose Alan Wake 2. En ligne droite, la durée de vie peut tomber à 15h, mais le joueur est quand même incité à prendre son temps et explorer le décor.
L'Antre de la folie
Comme évoqué plus haut, Alan Wake 2 nous fait voyager à Bright Falls aux côtés de Saga Anderson, l’occasion de revoir des lieux du premier volet mais également tout un tas de nouveaux décors dans les environs. Un monde semi-ouvert, Saga peut voyager très librement de zones en zones grâce à sa voiture, et il y a un tas de chemins alternatifs à découvrir, menant vers des lieux insolites qui participent grandement à l’immersion.
Alan a droit ici à un traitement particulier.
Le gameplay est donc plus ouvert, un peu répétitif sur la durée, mais Remedy a trouvé de bonnes idées pour pallier ça, notamment l’Antre mentale. Il s’agit d’un abri imaginaire où Saga peut remettre ses idées en place, accéder à divers documents, améliorer ses armes et surtout faire avancer l’enquête en plaçant ses indices sur un grand mur. Une mise en scène théâtrale digne des meilleurs thrillers, mais le joueur est guidé par la main, impossible de se tromper, la « difficulté » vient du fait de devoir trouver les indices. Il y a un dernier élément dans cette Antre mentale, c’est le Profilage, où Saga peut deviner les intentions réelles des autres personnages grâce à une sorte de don de voyance. Oui, ça sent quand même le bon deus ex machina (mais pas tout à fait) pour faire avancer l’histoire, mais ça fonctionne. Bon, soulignons quand même le fait qu’il n’est pas possible de paramétrer les touches du clavier dans l’Antre, obligeant à passer en QWERTY pour l’intégralité du jeu.
Et Alan Wake dans tout cela ? Eh bien, avons-le, l’écrivain se fait parfois voler la vedette par l’agent du FBI tant son enquête est passionnante, et étonnement personnelle, mais Alan a droit ici à un traitement particulier. Toujours enfermé dans un monde parallèle par l’Ombre Noire, l’auteur est ici dans une version alternative de New York, et il tente depuis 13 ans d’en sortir. L’environnement est bien plus restreint, mais encore plus labyrinthique, grâce à une étrange lampe qui permet de révéler de nouveaux chemins, à condition d’avoir de la lumière. Chez Alan, pas d’enquête comme pour Saga, mais des énigmes, et des Ombres partout. L’auteur tente ici de trouver un moyen d’échapper à l’Ombre Noire, et pour cela, il doit écrire. L’Antre mentale est ici remplacée par le grenier d’une cabane où Alan regroupe ses idées, avec une mécanique de gameplay vraiment bien trouvée : après avoir découvert une idée de scénario, le joueur peut l’appliquer à une scène (un petit lieu de l’environnement) pour la modifier, et débloquer un passage. Une mécanique savamment utilisée pour donner lieu à des moments de réflexion, tout en étoffant un peu plus l’immersion et le flou dans la fiction. Alan est l’auteur, il décide de l’histoire, mais lui non plus ne comprend pas tout ce qui lui arrive. Et surtout, au fil de son aventure, c’est une plongée dans un terrifiant thriller qui s’opère, mettant en scène Alex Casey, un détective de polar (incarné par Sam Lake, de quoi rappeler des souvenirs aux fans de Max Payne) avec des séquences réellement cauchemardesques et sanglantes.
L'horreur, la vraie...
En parlant de cauchemars, Alan Wake 2 est un vrai survival-horror. Le gameplay n’a rien de révolutionnaire, il reprend les bases du premier volet, avec une caméra à la troisième personne, mais la mise en scène fait absolument tout. L’éclairage, parfaitement maîtrisé, nous plonge dans des ambiances oppressantes, avec des jeux de couleurs variés qui accentuent le sentiment d’angoisse, même lorsque Saga et Alan n’ont pas l’arme sortie, signe que, normalement, rien ne va se passer.
Cela faisait bien longtemps que nous n’avions pas eu aussi peur devant un jeu vidéo.
Si le sound design joue pour beaucoup (faites le jeu avec un bon casque, c’est un régal), la réalisation technique est elle aussi à la hauteur des ambitions de Remedy. Le studio maîtrise son Northlight Engine, et ça se voit. Alan Wake 2 est techniquement impressionnant, les graphismes sont magnifiques, les textures sont sublimes, que ce soit de jour comme de nuit, par temps sec ou sous la pluie. Le studio finlandais a bien géré la mise en scène, avec de très beaux plans mis en valeur par la lumière, les animations dans les décors participent là encore à l’horreur, avec les feuilles qui bougent naturellement avec le vent, et les visages et animations faciales sont criants de réalisme. C’est une bonne chose, car parfois, la différence entre le jeu et les vidéos live-action est mince, l’immersion est totale. Et surtout, les développeurs se sont amusés avec le ray tracing. Control était déjà un modèle du genre, mais Alan Wake 2 utilise à la perfection les technologies RTX et DLSS 3.5 de NVIDIA pour des reflets sublimes, il est même parfois évident que des miroirs et surfaces réfléchissantes sont simplement là pour émerveiller la rétine, et rien de plus. Chose amusante, pour changer de scénario entre Saga et Alan, il faut passer par… une flaque, mal nettoyée par le concierge, dont le visage est déjà connu des joueurs.
... à en perdre son latin
S’il y a bien un point à redire que le jeu, c’est concernant son gameplay pendant les combats. La recette n’évolue pas, et que ce soit avec Alan ou Saga, il s’agit de viser un ennemi avec sa lampe et d’intensifier le faisceau lumineux pour l’affaiblir avant de le cribler de balles. Malgré la présence de boutons de raccourcis pour changer d’équipement rapidement et quelques armes débloquables pendant l’aventure, c’est basique et très répétitif, ça n’évolue pas, tout le principe réside dans la bonne gestion des ressources, surtout en mode Difficile. Les piles (sans marque ici) sont rares, il faut donc utiliser savamment d’autres objets comme des fusées éclairantes ou des grenades flash pour étourdir les Ombres.
Le titre est loin d’être un shooter plaisant, et c’est très bien comme ça.
Nous évoquions la rigidité des déplacements plus haut, il faut dire que le titre n’est pas non plus exempt de défauts. Si le gameplay est globalement agréable, il nous a fallu plusieurs fois tortiller la caméra dans tous les sens pour enfin voir apparaître la touche pour ramasser un objet dans un contenant, c’est agaçant, surtout en combat. Mais ce qui nous a le plus dérangé dans le jeu, c’est sa gestion des sous-titres français. Entre le fait que le texte ne corresponde pas à la voix (chose assez classique au cinéma mais beaucoup moins en jeu vidéo et qui peut être excusé par le fait que la plupart des joueurs font les jeux en VOSTFR et non en VFSTFR), que la VO remplace parfois la VF dans certaines lignes et surtout que l’affichage n’en fait qu’à sa tête, c’était parfois compliqué de suivre. Les sous-titres sont souvent décalés, même pire, nous avons eu une vidéo où tous les dialogues d’Alan pour cette séquence étaient affichés d’un bloc, prenant la moitié de l’écran… C’est bien dommage, car le doublage français est de très bonne qualité, les comédiens sont impliqués et fidèles à l’ambiance du jeu (même si la synchronisation labiale est elle aussi aux fraises). Vu la nature des soucis, tout cela devrait être corrigé avec une simple petite mise à jour, cependant, il vaut mieux profiter d’Alan Wake 2 en VF sans sous-titres ou en anglais (avec des sous-titres), tant les comédiens d’origine sont parfaits, certains prêtant leurs visages et doublant eux-mêmes leurs personnages.
Alan Wake 2 n’est pas qu’une simple suite d’un jeu vieux de 13 ans. C’est un excellent survival-horror qui place la barre très haut en matière d’écriture, de mise en scène, d’acting, d’immersion, de réalisation, mais pas forcément de finition. Le titre n’est pas exempt de tout petits défauts, mais qui vont sans aucun doute disparaître avec un patch. Et il ne restera plus qu’un jeu d’horreur réellement terrifiant, à la narration décousue mais terriblement logique, faisant entrer les joueurs dans un Remedy Connected Universe déjà introduit avec Control mais qui s’annonce passionnant à suivre. Alan Wake 2, c’est un jeu incontournable pour tous les amateurs d’horreur, de scénario tordu et de reflets magnifiques, à condition d’avoir fait Alan Wake 1 et Control avant.
Alan Wake 2 est disponible uniquement en version numérique, vous pouvez retrouver des cartes PSN sur Amazon, Cdiscount et la Fnac.
- Un vrai jeu d’horreur, terriblement angoissant
- Un scénario alambiqué et passionnant
- Des graphismes sublimes
- L’éclairage et la mise en scène parfaitement maîtrisés
- Le sound design ultra flippant
- L’Antre mentale de Saga, une bonne idée
- Les énigmes des scènes de crime avec Alan, une excellente idée
- La frontière entre la réalité et la fiction constamment floue
- Le jeu des comédiens, en VF mais surtout en VO
- Des combats un peu répétitifs
- Des jump scares pas tous pertinents
- De tout petits soucis techniques
- (Faire Alan Wake et Control est nécessaire avant de jouer)
Rédacteur - Testeur Clint008 |