L’illusion du choix ?

Pour totalement nous immerger dans cette période du Japon féodal, un mode dit Immersif a été ajouté en option audio, qui en plus de proposer le doublage japonais fait parler en portugais certains personnages, dont les PNJ jésuites. C’est évidemment ce que nous avons choisi. Clairement, difficile de repasser ensuite dans une autre langue pour Naoe et Yasuke tant leurs voix nippones sont excellentes. Et plus généralement, nous avons reconnu de très bons seiyū. Toutefois, ce mélange est loin d’être parfait, puisque certains étrangers parlent tout simplement japonais lors de cinématiques en fin d’aventure sans que le contexte le justifie. De même pour Yasuke durant un passage lors duquel il ne devrait même pas encore en connaître un seul mot. Rien de choquant par rapport à tous les précédents jeux nous faisant choisir une unique langue, mais nous espérons du mieux à l’avenir si l’idée est reprise. Quant aux éléments audios du « présent », ils nous sont alors délivrés en français, soit le même réglage que l’interface. Par conséquent, certaines voix entendues en japonais dans l’aventure ne le sont pas lors de ces passages. Ils peuvent tout de même être réécoutés dans l’Animus Hub n’importe quand, mais pour modifier l’audio, il est nécessaire d’avoir désactivé le mode Immersif en jeu au préalable, ce qui n’est pas super pratique. Notons qu’entre ce qui est dit dans la langue de Mishima et la localisation, des différences notables sont évidemment à constater, comme le changement de registre dans la manière dont Naoe désigne son père : otō à l’oral alors que chichiue est utilisé dans la « traduction ». Enfin, sachez que la VF de Louis-San qui avait fait polémique pour l’amusant Tokubei, considéré comme mal doublé à la suite des previews, a bien été remplacée. C’est clairement mieux. De ce que nous avons entendu de certaines autres voix, cela semble correct dans l’ensemble, mais nous ne pouvons que vous conseiller de sélectionner le mode Immersif ou juste le japonais, surtout pour la synchronisation labiale.

Les Objectifs reprennent la forme adoptée dans Assassin’s Creed Mirage.

Sur bien des points, nous avons ressenti qu’Ubisoft Québec a tenté avec Shadows de concilier la formule RPG avec la structure plus linéaire des anciens titres afin de plaire à un maximum de joueurs. Cela se traduit tout de même un peu différemment de l’approche proposée par Mirage. La pierre angulaire de cette vision est la liberté de choix qui nous est laissée ou que nous pouvons mettre volontairement de côté concernant les dialogues. Un mode Histoire imposée est en effet disponible, qui sert à proposer la version canonique de ce récit, supprimant alors les choix à effectuer durant les cinématiques. Ce n’est pas ce que nous avons sélectionné afin de pouvoir tester les diverses possibilités et nous ne pouvons que vous conseiller de ne l’utiliser que lors d’un deuxième playthrough. La raison en est simple, il n’est alors pas possible de recruter l’ensemble des alliés pour notre Ligue et les options de romance ne sont pas présentes. Oui, elles sont de retour, avec plusieurs partenaires possibles à la fois pour Naoe et Yasuke, qu’ils soient ou non du même sexe. Pas intéressé ? Vous avez juste à passer votre chemin, cela n’aura aucun impact. Au mieux, vous verrez quelques embrassades lors de cinématiques, le reste étant laissé à l’imagination.

Du côté des quêtes principales, certains passages complémentaires existent donc en deux versions différentes en fonction de qui nous incarnons, proposant plus ou moins de gameplay. Pour prendre un cas concret joué sous tous les angles, Yasuke devait juste parler à trois personnages en tant qu’invité, tandis que pendant ce temps Naoe espionnait ce qui se tramait en coulisse, le tout aboutissant à la même cinématique. Cette double perspective est intéressante et globalement bien amenée, avec également des décisions lors des dialogues qui peuvent opposer leurs visions. De plus, ce type de mission prend place dans un espace délimité par les murs de l’Animus, obligeant parfois à traverser des zones bien gardées plutôt que de les contourner. Cela rappelle forcément les plus anciens jeux et nous apprécions.

Le studio a également fait le choix de ne pas proposer de corridor de la mémoire au moment des assassinats. Cela ne veut pas dire que nos protagonistes n’ont pas une dernière discussion avec leur victime, mais l’approche est là encore plus terre à terre. Yasuke n’ayant visiblement pas de gène isu, la décision est compréhensible. De plus, cela permet des effets de mise en scène ayant un fort impact avec des mises à mort sanglantes dans un style Kurosawa en noir et blanc auquel s’ajoute le rouge de l’hémoglobine. Elles soulignent d’ailleurs bien l’évolution du duo, l’une des premières effectuées par Naoe nous ayant sacrément surpris dans son exécution, malgré le côté légèrement « cartoonesque » de la situation. Cette violence graphique est toutefois contenue, certains tranchages de tête se faisant hors champ quand bien même nous massacrons des PNJ à tour de bras de la sorte.

Les choix se retrouvent aussi dans la structure même des Objectifs, qui pour notre plus grand plaisir reprennent la forme adoptée dans Assassin’s Creed Mirage, soit un ensemble de tableaux avec les cibles et PNJ donneurs de quêtes de chaque région. Au départ, cela se limite à nos protagonistes, à l’état du Repaire, à la Ligue et à l’ensemble des Onryō. Mais à mesure de notre exploration du monde, cet écran va s’étendre… énormément. Plus d’une quinzaine de factions dont il faut éliminer la plupart des membres finissent par y être affichées. Progresser avec certains est nécessaire, mais la majorité constitue du contenu annexe sur lequel revenir lorsque nous le souhaitons ou avons le niveau requis. En dehors des dernières cibles du Shinbakufu, c’est donc à nous de décider à qui nous attaquer en priorité, nous amenant alors à visiter certaines zones et en découvrir l’histoire. De notre côté, nous avons suivi l’ordre des niveaux leur étant attribués, puisque grimper jusqu’au niv. 35 n’était tout de même pas une sinécure, et cela nous a finalement semblé assez logique. Si vous n’aviez pas aimé les longs arcs narratifs de Valhalla, rassurez-vous, la traque de chaque membre est dans l’ensemble assez rapide. Pour vous donner une idée, Ubisoft nous indiquait qu’il faudrait environ 60 heures pour terminer la trame principale et voir l’épilogue, une durée que nous avons clairement dépassée. Tous n’ont pas forcément un long temps d’écran pour les développer et en avoir moins aurait sans doute évité un léger ventre mou, mais nous en conservons globalement un bon souvenir. Notez que les intrigues sont assez localisées dans chaque région, invitant ainsi à l’exploration du reste.

Un certain écueil est toutefois venu se frotter à l’immersion sans véritablement nous déranger, mais que nous souhaitons relever. Comme déjà dit, des dates sont données afin de fixer dans le temps les évènements initiaux ou antérieurs au récit. Passé le prologue et notre accès au monde ouvert dans la région d’Izumi Settsu (niv. 3), il n’y a plus d’indication et c’est parfaitement compréhensible. En effet, hormis la traque des premières cibles, la majeure partie du jeu est coincée entre deux évènements historiques prenant place dans un laps de temps très restreint. Rien que le cycle jour-nuit et les saisons viennent mettre à mal cette illusion. En ayant déjà connaissance de l’Histoire, nous l’avons vite compris et il semble quasi inconcevable que le duo ait pu effectuer toutes ces actions sur cette durée (la communauté se fera sans doute un plaisir d’essayer de tout caser). Pour autant, le respect historique est total dans les grandes lignes. Même en sachant quel sort va connaître un antagoniste ayant existé, le pourquoi et le comment suffisent à nous tenir en haleine.

Assassin’s Creed Shadows introduit également un concept qui joue avec les choix moraux de nos personnages et donc les nôtres : la possibilité d’épargner certaines cibles ! Bon, la plupart ayant droit à ce traitement de faveur sont secondaires, mais c’est tout de même une belle évolution. Toutefois, les scénaristes en ont aussi usé pour créer de faux embranchements. Nous ne prendrons comme exemple que le cas évoqué dans notre preview, que nous avions alors choisi de tuer. Eh bien, vouloir l’épargner conduit au même résultat, bien que moralement plus « acceptable ». Deux décisions peuvent aussi mener au même dénouement, mais avec des éléments en plus comme l’acquisition d’un certain compagnon canin ou littéralement un affrontement de boss additionnel (ou en moins selon le point de vue). Nous avons même relevé une variation en fonction de la survie ou non d’un personnage vraiment anecdotique que nous n’avions même pas vu mourir la première fois.

Alexandre SAMSON (Omega Law) Rédacteur
Accro à Assassin's Creed et Destiny, grand amateur de RPG et passionné d'expériences vidéoludiques en général. Lecteur de comics (DC) et de divers mangas (One Piece !). Chimiste de formation et Whovian dans l'âme.
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